Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Ecrivain de la comédie romande - Page 205

  • Champion du monde !

    images.jpegIl n'a pas été invité au grand raout de L'Hebdo la semaine dernière. Pourtant, à tout lui seul, Frédéric Hainard compte plus que les cent Têtes Molles que l'Hebdo a essayé de draguer. Il est jeune et dynamique. C'est un décideur. Il a su se faire élire au Conseil d'Ètat neuchâtelois en camouflant ses erreurs et en dupant les électeurs. Il a les méthodes vigoureuses d'un shérif à qui on ne la fait pas. Et, depuis sa confession filmée de vendredi, il sait toucher au cœur tous les hommes amoureux de plusieurs femmes (ou le contraire). À n'en pas douter, Hainard est un fleuron du libéralisme nouveau : égoïste, rustre, aveuglé par son propre pouvoir, sentimental.

    On se réjouit de lire la suite de ses aventures dans les journaux du matin. Car ce champion du monde nous réserve encore bien des surprises.

  • Les trois visages de l'homme blanc

    1013771711.2.jpgLe lendemain, je marche dans les rues éblouissantes. Depuis le commencement des temps, le monde occidental ne connaît qu’une couleur : BLANC. La seule chose qui me reste, dans cette neige aveuglante, ce sel amer, c’est l’ombre accrochée à mes pieds, cette tache en forme de feuille de bananier qui glisse en silence sur le sol.
    Je suis dans l’autre monde : des mots partout, des mots écrits noir sur blanc ou clignotant de lueurs vives, des mots abandonnés par d’autres hommes, des messages et des signes, une mousson de mots qui donnent le vertige, tracés le plus souvent dans une langue unique, la langue du monde global, Coke the Real Thing, Nespresso : what else ? Why Don’t You Try Me ? Des mots qui tremblent comme des appels à la détresse, regardez-moi, écoutez ma prière, achetez s’il vous plaît ma camelote, des mots comme autant de bouteilles à la mer.
    Genève, un monde en soi.
    Sur les affiches, les mots sont des images et des marques. Ils servent de légendes à des scènes vivantes où reviennent partout de grandes femmes maigres aux jambes transparentes, des voitures rutilantes prises sous tous les angles, des visages d’enfants surpris dans des postures singulières, certains déroulant d’immenses rubans de papier bleu lavande, d’autres au faciès réjoui engloutissant leur poids en céréales, d’autres encore perdus parmi des nègres faméliques et vantant les mérites d’un lait vitaminé…
    Tout à coup, je comprends mon vertige.
    J’ai sous les yeux les trois visages de l’homme occidental :
    la femme qu’il ne sera jamais ;
    la voiture qui incarne la nostalgie de sa virilité ;
    et l’enfant qu’il ne sait plus faire.

  • Cent Têtes Molles pour un pays mou

    crop1.jpgMichel Zendali le dit fort bien : c'est une malédiction qui revient chaque année, comme le Beaujolais nouveau ! Je veux parler du Forum des Cent organisé par l'Hebdo, et qui regroupe, l'espace d'un week-end, tout ce que la Suisse romande compte de « décideurs », de « VIP » ou de vulgaires « people ». D'année en année, la sélection devient plus difficile, étant donné l'étroitesse de notre petit pays, et le fait que les mêmes Têles Molles ne peuvent revenir deux ans de suite. L'hebdomadaire Vigousse, sous la plume acide de Laurent Flutsch, en fait le constat atterrant (voir ici). On ne peut qu'être d'accord avec lui…

    Je ne m'arrêterai que sur un point. Dans la fameuse liste des 100 Têtes Molles de notre grande région ne figure aucun intellectuel (ou, si le mot vous effraie, aucun penseur, philosophe ou artiste important)! Hé oui, personne ne pense, n'écrit, ne crée, ne réfléchit sur le monde ou la société ou l'homme ou la femme, en Suisse romande. Cela s'explique bien sûr par le peu de vision des gens de L'Hebdo, obnubilés qu'ils sont par les nouveaux « people » (c'est-à-dire annonceurs) à draguer. Cela indique aussi, à mon sens, la peur de la pensée qu'affiche de plus en plus certains médias. Peur du doute et de la contestation. Peur de la réflexion critique. Peur de ce qui n'entre pas dans les normes médiatiques. Peur de ce qu'ils ne peuvent pas comprendre.

    En même temps que L'Hebdo célébre le désert de la pensée romande, le Nouvel Observateur consacre son dernier numéro au « Pouvoir intellectuel » Bien sûr, on ne sort pas de France. Mais quelle différence avec nos chères Têtes Molles romandes ! L'Obs interroge Elisabeth Badinter, Pascal Bruckner, Régis Debray, Pierre Nora et l'incontournable Michel Onfray. Et beaucoup d'autres. On se rend compte alors que la France aime la pensée et les penseurs. Cela tient à sa tradition littéraire. Mais aussi à son goût du débat, de la critique et de la controverse. En France, la pensée est vivante et toujours discutable. C'est-à-dire ouverte aux autres. À la confrontation des idées, des morales et des idéologies.

    Ce qui semble de plus en plus absent en  Suisse romande. Non faute de combattants (les penseurs existent, bien sûr, ici aussi, et ils ne sont pas plus nuls qu'ailleurs). Mais faute de véritables passeurs médiatiques.