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  • Une malédiction familiale

    massardheritage.jpgMettre des mots sur « les furies qui tremblent en elle » : telle est l’obsession de Heide, allemande d’origine, mais installée en Suisse depuis la guerre, qui s’interroge sur l’étrange malédiction qui touche sa famille, et celle de son frère, ancien officier de la SS. En effet, dans l’une et l’autre branche familiale, les maladies graves ou mortelles se multiplient, frappant tantôt la fille ou le fils, tantôt les petites-filles. Pourquoi un tel acharnement ? Y aurait-il une raison à cette malédiction familiale ?
    On reconnaît ici les thèmes chers à Janine Massard (née à Rolle en 1939) : la famille en proie à cet ennemi intime et terrifiant qu’est la maladie, qui sert de révélateur aux relations humaines ; la soif de vivre inextinguible ; l’interrogation du passé qui éclaire le présent. Si Comme si je n’avais pas traversé l’été*, roman très autobiographique publié en 2001, était un acte de résistance contre la mort aveugle qui frappe ses proches (le père, le mari, la fille), L’Héritage allemand** est un livre de méditation et d’élucidation. De fantasmagories, aussi, car toutes les femmes qui peuplent le roman cherchent à comprendre, par le dialogue et la rêverie, ce qui leur arrive. « Il y avait eu des mots comme… la faute collective, tous ne paieront pas, beaucoup d’innocents seront touchés, mon père a dit ça à la fin de la guerre quand on a découvert tous les crimes… Il croyait si fort au châtiment qu’il était convaincu que trois générations seraient nécessaires aux Allemands pour se faire pardonner… »
    On sent Janine Massard marquée par la lecture des Bienveillantes, de Jonathan Littell. À son tour, la romancière interroge les crimes du passé : et si toute sa famille portait le poids des crimes commis par son frère ? Si le destin se vengeait aujourd’hui sur ses proches, victimes innocentes, mais porteuses du même sang criminel ? Belle-fille de Heide, Léa s’interroge, et se révolte aussi : « qu’avait-elle fait pour être ainsi punie ? Le scénario d’un syndrome du châtiment, subséquent aux crimes jamais avoués d’Onkelhaha, s’était incarné quand des pics de douleur l’avaient fait vaciller. »
    On le voit : avec son Héritage allemand, Janine Massard nous entraîne dans des abîmes vertigineux. Qu’hérite-t-on avec le sang de ses aïeux ? La maladie vient-elle venger un passé inavouable ? Et que peut-on faire face à cette malédiction ? Sondant avec lucidité les personnages qu’elle met en scène (presque tous féminins), Janine Massard creuse le mal jusqu’à sa racine. Le passé empoisonne l’existence des vivants, d’autant plus que ce passé est occulte. Il faut lutter contre la maladie, en même temps que reconnaître la source du mal. Dans cette quête poignante de vérité, Janine Massard ne triche pas, comme à son habitude : quitte à se brûler les ailes ou les yeux, elle cherche une lumière qui soulage, mais aussi qui aveugle. Elle va jusqu’au bout du chemin, non sans humour, ni compassion.

    * Janine Massard, Comme si je n’avais pas traversé l’été, roman, éditions de l’Aire, 2001.
    ** Janine Massard, L’Héritage allemand, roman, Bernard Campiche éditeur, 2008.

  • L'échec d'Israël

    images.jpegQue faut-il faire avec ses ennemis — intimes? Dialoguer avec eux? Les combattre par la force? Pactiser? Les exterminer?
    Depuis 60 ans, Isräel ne sait que faire de ses ennemis, en particulier le Hamas — mouvement à la fois politique, religieux et « terroriste ». La stratégie qu'il utilise, la démonstration de violence, toujours la meme, se révèle à chaque fois dangereuse et stérile. Rappelonsl'histoire récente, comme le fait Dominique Eddé, dans Le Monde du 5 janvier : «L'opération "Raisins de la colère", accompagnée du massacre de Cana, au Liban, en 1996 ? Elle a renforcé le Hezbollah et s'est soldée par le retrait des troupes israéliennes du Liban sud en 2000. L'opération "Rempart à Jénine", au printemps 2002 ? "Voie ferme", deux mois plus tard ? 2002 et 2003 ont été des années sanglantes pour les populations civiles en Israël : 293 morts. "Arc-en-ciel", en mai 2004 ? "Jour de pénitence", quatre mois plus tard, au nord de la bande de Gaza, avec les mêmes sinistres bilans ? Les assassinats de dirigeants politiques du Hamas exécutés et revendiqués sans complexe par le pouvoir israélien ? Les attentats-suicides ont culminé en 2005. Et, au début de l'année suivante, le Hamas obtenait la majorité absolue aux élections législatives. »
    Il y a, dans la politique israélienne, une véritable culture de l'échec, qui repose sans doute sur un vrai désarroi. C'est pourquoi, l'un après l'autre, les divers gouvernements au pouvoir s'obstinent dans une politique du pire. Bien sûr, personne ne veut le reconnaître, car il n'est pas facile de reconnaitre ses échecs. Mais cette politique vient de faire, à Gaza, près de 1000 morts, dont un tiers de femmes et d'enfants…
    Pourquoi, alors, continuer?
    Les raisons ne manquent pas : parce que les élections israéliennes sont proches, et qu'il faut montrer au Hamas (et au monde entier) qui est le plus fort. Parce que les Palestiniens, une fois encore, méritent une bonne leçon. Parce que Barak Obama, futur président des États-Unis, risque de vouloir changer la donne au Proche-Orient. Parce qu'il faut souder la population israélienne face à un ennemi commun et infréquentable…
    Encore et toujours, à l'œuvre, la fameuse logique du bouc émissaire, chère à René Girard : pour assurer sa cohésion, une communauté doit désigner un bouc émissaire et l'immoler sur la place publique. Ce que fait parfaitement Israël…
    Cette logique vieille comme le monde remporte, semble-t-il, un grand succès en Israël, où la majorité de la population soutient l'opération punitive de son armée. Le problème, c'est qu'elle dresse toute la communauté internationale contre l'État hébreu, car le monde entier est las, aujourd'hui, de ces logiques archaïques et sanglantes, qui ne mènent nulle part.

     

    Lien permanent Catégories : Histoire
  • Nouvelle émission sur Radio-Cité

    images-2.jpeg Pour celles et ceux que cela intéresserait, voici une nouvelle émission, animée par Geneviève Morand, sur Radio-Cité 92.2. tous les lundi de 13h à 14h, Rezonance.
    Rencontres, réseau professionel et amical, musiques, lectures : votre serviteur a eu la chance d'étrenner la première émission, le lundi 5 janvier 2009.
    Voici le lien.