On connaît la dernière blague qui circule à Gaza : « Notre passé est un cauchemar ; notre présent, un enfer ; heureusement, nous n'avons pas d'avenir ! »
Obnubilés, c'est-à-dire aveuglés par les derniers développements de la dernière crise à la mode, les turpitudes de l'UBS, la scélétatesse avérée de nos banquiers, on en vient à oublier l'essentiel. Il y a quelques semaines, non dans l'indifférence, mais plutôt l'impuissance générale, l'armée israélienne semait la terreur et la mort dans la bande de Gaza. Plus de 1300 victimes, dont la plupart civiles, femmes, vieillards et enfants. Une destruction systématique des infrastructures palestiniennes, ponts, écoles, hôpitaux — et même les bâtiments du Parlement…
Tout ce que l'on peut espérer, c'est que les crimes israéliens ne demeurent pas impunis, et soient jugés, le plus rapidement possible, par un tribunal international.
Pour se rendre compte, de visu, de la situation dramatique qui règne à Gaza, une délégation de parlementaires suisses a sillonné les lieux pendant plusieurs jours, interrogé la population, mené son enquête de manière libre et indépendante. Antonio Hodgers, Josef Zisyadis, Jean-Charles Rielle et Carlo Sommaruga composaient cette délégation. Ils étaient accompagnés par le plus talentueux des dessinateurs de presse romands, Patrick Chappatte . On ne présente plus ce génie du trait et de la flèche, qui commença sa (brillante) carrière il y a quinze ans, au quotidien La Suisse. Aujourd'hui, Chappatte fait les beaux jours du journal Le Temps, dont il est l'un des fleurons. Accompagnant la délégation helvétique, Chappatte a tenu, tout au long du séjour, une sorte de carnet de bord en dessins et en textes. On peut découvrir ce chef-d'œuvre sur le site du Temps, ici. La BD de Chappatte porte un regard effrayé et effrayant sur les atrocités commises en quelques semaines à Gaza, où plus de 430 enfants ont perdu la vie, certains littéralement désintégrés par les bombes au phosphore blanc, qui agit comme le napalm. Des familles entières décimées, abattues devant le seuil de leur maison. Des hôpitaux surpeublés et manquant de médicaments. Si les mots manquent souvent pour dire l'horreur des crimes de guerre, les croquis de Chappatte sont extraordinairement éloquents, et valent tous les discours.
Que faut-il faire avec ses ennemis — intimes? Dialoguer avec eux? Les combattre par la force? Pactiser? Les exterminer?
Face à l'escalade de violence qui fait rage au Proche-Orient, l'observateur occidental a le choix entre deux terrorismes, différents l'un de l'autre, mais complices au final. Le Hamas, d'un côté, qui joue avec le feu, depuis longtemps, en balançant sur Israël ses dérisoires roquettes artisanales — autant dire des pétards. De l'autre, Israël qui pratique, depuis toujours, la Loi du Talion, mais un Talion à la puissance 10 ou 100, puisqu'à un soldat israélien tué correspondent près de 100 Palestiniens (civils ou militaires) abattus. Deux terrorismes, donc. Un terrorisme dit de « résistance » et un terrorisme d'État s'appuyant sur une invincible armée et des appuis internationaux puissants.