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prix des auditeurs

  • Littérature morte, littérature vivante

    L'écrivain Georges Bataille disait qu'il y a deux sortes de livres : ceux qui sont mauvais, et qui se vendent beaucoup ; et les autres, qu'il faut aller chercher et mériter, et qui se vendent mal. Sans être aussi moral, je dirais, pour ma part, qu'il y a deux sortes de littérature : la littérature morte et la littérature vivante.

    Deux Prix littéraires, attribués récemment en Suisse romande à Jean-Marc Lovay et à Antonio Albanese, en sont l'illustration.

    images-1.jpegLe Prix Lipp, tout d'abord, créé il y a vingt ans par l'extraordinaire Anton Jaeger, directeur de la Brasserie Lipp de Genève, personnage chaleureux et haut en couleur, hélas décédé. Cette année, après moultes tergiversations, le Prix a été attribué à l'écrivain valaisan Jean-Marc Lovay (né en 1948) pour son dixième roman, Tout là-bas avec Capolino*. Je ne dirai jamais que Lovay écrit de mauvais livres. Je suis incapable d'en juger, n'étant jamais parvenu à en terminer un seul. En revanche, il me semble que ses livres relèvent d'une littérature morte. Autrement dit, d'un mode ancien, désuet, suranné, d'écrire, reposant sur le délire et l'hallucination (dans la proximité d'Henri Michaux, le génie en moins), l'absence d'intrigue, de personnages, de relation au monde réel et à l'histoire, etc. Ceux qui lisent régulièrement des livres auront reconnu les années 70 dans toute leur splendeur. L'âge de glace du Nouveau roman et des théories littéraires. La sublimation du Rien.

    antonio-albanese-copyright-hugues-siegenthaler.jpgFace à Lovay, Antonio Albanese, un jeune auteur lausannois (né en 1970) qui vient de recevoir le prestigieux Prix des Auditeurs de la Première, fait figure de nobody. Pourtant, son premier roman, La Chute de l'Homme**, est un coup de maître. Il raconte les mésaventures d'un personnage, critique d'art et père d'une petite fille de sept ans, fait de chair et de sang qui mène une enquête autour d'un tableau mystérieux, lequel va servir bientôt de miroir à sa propre vie. Le style est vif et dynamique, profond, élégant. L'intrigue est bien menée. L'humour brille à chaque page. Difficile, en tout cas, de lâcher le roman avant d'en avoir découvert la chute, précisèment, qui surprend le lecteur. Bref, un petit miracle de roman, comme tombé du ciel, qui laisse augurer d'une brillante suite.

    * Jean-Marc Lovay, Tout là-bas avec Capolino, Zoé, 2009.

    ** Antonio Albanese, La Chute de l'Homme, l'Âge d'Homme, 2009.