Pendant trois ans, l'enfant est assailli de cauchemars. Il appelle au milieu de la nuit. Et l'on se précipite dans sa chambre. En général, c'est moi — je ne dors que d'un œil. Je le prends dans mes bras, je le berce, je fredonne une chanson, je passe ma main dans ses cheveux si doux. Je pose un baiser sur ses joues baignées de larmes.
« Ce n'est qu'un mauvais rêve, allons, tout est fini maintenant. »
Je retourne me coucher, les draps sont encore chauds, mais bien sûr je n'arrive plus à fermer l'œil. La nuit est perdue. Je somnole, je guette les prochaines larmes. Je suis sur le pied de guerre. Par la fenêtre, je regarde le jour se lever. C'est le plus beau moment de la journée. J'entends les premières voitures dans la rue.
Quelle heure peut-il bien être ?
Je jette un œil sur le réveil. Je vais dans la cuisine me faire une tasse de café, regarder encore une fois par la fenêtre.
Surtout pas faire de bruit.
L'enfant dort comme un ange.
Chaque nuit, désormais, j'entends les cris qu'il pousse dans l'alcôve. Je sais qu'il n'est pas là, mais je me lève quand même. J'ouvre la porte de sa chambre. La chambre noire. La chambre vide. (Ce vide est à présent le centre de ma vie.) C'est là qu'on développe les images. Toutes les images. Celles qu'on adore et conserve pieusement. Et celles que l'on a oubliées.
Même les images fantômes.
* extrait d'un roman en chantier.