Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

livres en fête - Page 66

  • La belle ténébreuse

    images-4.jpeg

    On ne présente plus Jerome Charyn, né à New York en 1937 et auteur d'une vingtaine de romans, d'essais et de bandes dessinées (en collaboration avec Boucq et Loustal) : c'est sans doute l'un des écrivains les plus marquants que les Etats-Unis nous aient donnés (inoubliable Poisson-chat ou encore Frog).

    Lui aussi, et de quelle manière, se penche sur son enfance, dans La Belle ténébreuse de Biélorussie** qui est une traversée magique du Bronx des années quarante, et un portrait époustouflant de femme (sa mère) constamment exilée d'elle-même. Originaire de Moguilev, en Russie blanche, réfugiée aux Etats-Unis pendant la guerre, Faigele (en yiddish : oiseau), doit survivre et faire vivre sa famille. Mais qu'elle soit croupière pour le compte d'un gros bonnet du Bronx, « chameau » pour son ami Chick, véritable Robin des Bois du marché noir ou, de retour à l'usine, trempeuse de cerises dans du chocolat, Faigele traverse la vie en somnambule, toujours sur « une ligne brisée », et suscite la fascination (et quelquefois la peur) partout où elle passe.

    C'est son fils Jerome (dit la Teigne) qui raconte l'histoire, trace le portrait d'une mère aux manières insolentes qui n'a pas froid aux yeux, comme on dit, et brave les dangers les plus extrêmes. Mais c'est plus qu'un portrait, une photographie aux contours plus ou moins nets : il s'agit d'une légende (toute mère, pour son fils, n'est-elle pas une légende vivante ?) et aussi d'une interrogation sur l'origine de l'écriture. Comment devient-on écrivain, et pourquoi ? Chez Charyn, exilé russe parmi les exilés, puis chassé de l'école, écrire est une opération de survie : « il fallait que nous fixions chaque mot, que nous le fassions résonner sur notre langue, avant qu'il ne consente à nous livrer son secret. Les mots flottaient, accrochés à un filin, tels des navires sur une mer moutonneuse, et il fallait leur accorder toute l'attention d'un capitaine au long cours si l'on voulait jamais apprendre à lire. »

    *Jerome Charyn, La belle ténébreuse de Biélorussie, Folio.

  • À quoi sert le théâtre ?

    images-2.jpeg

    On connaissait Sylviane Dupuis pour ses recueils de poésie (D'un lieu l'autre, publié en 1985 par Empreintes, et surtout Creuser la nuit, paru la même année), un essai sur l'errance (Travaux de voyage, Zoé, 1992) et ses pièces de théâtre, comme La Seconde chute, par exemple, jouée au Théâtre de Poche. Les Editions Zoé ont eu la bonne idée de rassembler les textes que Sylviane Dupuis a donnés, de mars 1994 à aout 1995, à la revue du Théâtre du Grütli et qui forment un intéressant petit volume, à la fois provoquant et éclairant*, volume lui-même doté d'une postface d'Eric Eigenmann.

    Passionnée de théâtre, Sylviane Dupuis l'est depuis toujours et sans doute est-elle bien placée, en tant que spectatrice et auteur elle-même de plusieurs pièces, pour en parler. Son livre est une promenade érudite et plaisante à travers le(s) théâtre(s) d'aujourd'hui. Chaque chapitre prend comme point de départ une représentation : cela va de L'Homme qui…, dans la fameuse mise en scène de Peter Brook, au Faust médusant de Strehler, en passant par tous ceux qui inventent aujourd'hui le théâtre : Stéphane Braunschweig, Valère Novarina ou Koltès.

    La réflexion est fine, non seulement documentée (Sylviane Dupuis, qui est aussi enseignante, connaît très bien l'histoire du théâtre), mais aussi engagée, au sens existentiel du terme. Et l'on tire un grand profit à la lecture de ces pages à la fois modestes et pénétrantes, qui sont le fruit d'une expérience véritable du théâtre.

    * Sylviane Dupuis, À quoi sert le théâtre ? MiniZoé, 1998.

  • Roman des Romands : une sélection moins provinciale

    images.jpegVoici, en primeur, la deuxième sélection du Roman des Romands, dont le Prix (doté de 15'000 Frs) sera remis en janvier prochain. Rappelons que cette initiative — faire lire et rencontrer aux lycéens, gymnasiens, collégiens romands la fine fleur des écrivains dans ce pays — est due à Fabienne Althaus, enseignante au Collège de Saussure, qui n'a ménagé ni son temps ni son énergie pour mettre sur pied ce Prix, soutenu par tous les cantons romands.

    Les auteurs sélectionnés cette année sont au nombre de onze (6 hommes et 5 femmes). Après une première sélection 2009 très « provinciale », et à vrai dire assez médiocre (on ne comptait, à mon sens, que trois véritables écrivains : Pascale Kramer, Yasmine Char et Alain Bagnoud), la sélection de cette année semble plus équilibrée. Les grands éditeurs n'ont pas été oubliés (mis à part l'Âge d'Homme, le plus important éditeur de Suisse romande !). Tous ces ouvrages ont déjà été ou feront l'objet d'une note de lecture dès que je les aurai lus…

    BURRI, Julien. Poupée. Campiche.

    CHATELAIN, Sylviane. Dans un instant. Campiche.

    FONTANET, Mathilde. L’Etang. Metropolis.

    GAULIS, Marie. Lauriers amers. Zoé.

    GLIKINE Alexandre. Alypios. Ed La Différence

    LOVEY, Catherine. Un roman russe et drôle. Zoé.

    MEIZOZ, Jérôme. Fantômes. Ed D’en Bas

    REVAZ, Noëlle. Efina. Gallimard.

    SANDOZ, Thomas. Même en en Terre. Ed D’autre part.

    SONNAY, Jean-François. Le pont. Campiche.

    TESTA, Philippe. Sonny. Navarino.

    Un seul regret : les trois meilleurs livres parus en Suisse romande cette année ne font pas partie de cette liste ! Les voici :

    1) Cancer du Capricorne, de Jean-Jacques Busino (Rivages, 2009).

    2) Saga Le Corbusier, de Nicolas Verdan (Campiche, 2009).

    3) La Chute de l'Homme, d'Antonio Albanese (l'Âge d'Homme, 2009). Prix des Auditeurs de la RSR 2010.