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L'ère du soupçon

images-5.jpegUn soupçon pèse aujourd'hui sur la presse. Ce n'est pas tout à fait nouveau. Il y a longtemps que la presse, pour certains, est au service du Pouvoir (ou des pouvoirs). Les pays totalitaires, c'est bien connu, ont une presse à voix unique et dûment muselée. Heureusement, nous ne vivons pas dans un pays totalitaire, nos journaux sont riches et diversifiés, et pourtant, très souvent, nous avons l'impression d'une information orientée à sens unique.

On a longuement disserté sur le fiasco ahurissant de la presse bien-pensante, qui n'a rien vu venir — ni le Brexit, ni l'élection de Donald Trump, ni la désignation de François Fillon à la primaire de la droite française, etc. Aveuglement momentané ? Politique du déni ? Ou recours à la méthode Couet ? Toutes les explications ont été avancées pour expliquer un tel acharnement (presque jubilatoire) dans l'erreur.

« Votre raisonnement est factuellement faux, disait un jour Lénine.

— Oui, mais il est politiquement correct, rétorqua Trotski.

Pourquoi donc les électeurs (et les lecteurs, car chaque lecteur est un électeur) n'ont-ils pas suivi les directives des journalistes, pourtant bien informés et si bien intentionnés ?

images-2.jpegParce que nous sommes entrés, avec Nathalie Sarraute (photo de gauche), dans l'ère du soupçon : pour la plupart des gens, les journaux (la radio, la télévision) ne disent plus la vérité. Ou plutôt : cette vérité n'est plus une, pure, univoque. Le lecteur a compris que cette vérité est partiale et orientée. Toujours dans le sens qui convient. Et il va donc la chercher ailleurs…

Où ? Sur les réseaux sociaux, par exemple, qui diffusent des vérités plus contrastées, diversifiées, souvent contradictoires. Il doit faire le tri entre les vraies et les fausses informations. Il compare les sources. Il juge sur pièces en jetant le soupçon sur ce qu'il lit (ce soupçon s'exprime à l'air libre dans les commentaires!). Aujourd'hui, le lecteur (l'électeur) butine entre les articles (certains très peu recommandables), surfe, papillonne comme un électron libre.

Il n'y a pas si longtemps, chaque journal avait un lectorat relativement stable et identifiable. Mais ces lecteurs se sont dispersés dans la nature. Ils vont faire leur miel dans d'autres ruches, un peu partout. Ils ne sont plus tenus par la pensée unique. Ils votent à rebours du bon sens. Ils expriment leur colère, leur exaspération ou seulement leur incompréhension face aux médias qui ne les voient jamais (ecar, pour eux, ils sont transparents). 

Oui, nous sommes entrés dans l'ère du soupçon.

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