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tartaglia

  • L'attentat bouffe (Après l'Orgie J-1)

    images-6.jpeg- Mais dites-moi, à la longue, Papi n’est-il pas fatigué de tout ce cirque ?
    - Comment l’avez-vous deviné ?
    - Je suis fin psychologue.
    - Avec le temps, c’est vrai, la lassitude s’installe. Surtout depuis ce mardi de décembre sur la Piazza Duomo à Milan…
    - Que s’est-il passé ?
    - Papi serrait tranquillement des mains. Comme d’habitude. Au milieu d’une forêt d’appareils numériques. Micros. Caméras de TV. Il y a beaucoup d’admiratrices. Une foule de gens qui veulent embrasser le Messie. Le toucher. Papi adore ces bains de foule. Ça lui donne une seconde jeunesse. Il a besoin de cette chaleur des corps agglutinés.
    - Et alors ?
    - Un homme se hisse sur la pointe des pieds. Il lève la main. Il lance quelque chose au-dessus de la foule. Une statuette de la tour de Pise. En bronze, tout de même. Papi reçoit la chose en pleine figure. images-2.jpegIl baisse la tête. Il porte à son visage un bout d’étoffe ponceau. Hugo Boss. Pour essuyer le sang qui coule. Il n’a pas mal. Il ne comprend pas ce qui lui arrive.
    - C’est une opération de com ?
    - Vous l’avez deviné !
    - Qui a manigancé cela ?
    - Bibi.
    - Vous êtes diabolique, Mademoiselle Ming ! Papi est au courant ?

    - Non. Pour que l’opération ait une chance de succès, il vaut mieux que la victime ne sache rien. C’est le principe de tous les attentats, d’ailleurs.
    - Comment réagit-il ?
    - Il rentre dans la voiture blindée, poussé par ses gardes du corps. Les journalistes, les photographes se pressent autour de lui, attirés par l’odeur du sang. Comme les requins. Je suis dans la voiture. Quand je le vois s’asseoir sur la banquette, le visage dans les mains, je lui dis de se ressaisir. Le Chef ne pleure pas. Je le sermonne. Avec vigueur. Le corps du roi ne peut pas mourir. Jamais. Il me regarde. Les yeux mouillés. Il doit sortir de la voiture. Sourire à l’agresseur. Montrer qu’il est invulnérable. Après quelques secondes, Papi se dresse sur le marchepied. Il montre son visage. Couvert de sang. Il offre cette image à toutes les caméras du monde. Il brave la mort en souriant. Avec ses dents cassées. Icône de l’héroïsme. Nous
    avons tous un corps. Mais le vôtre est mortel. Éphémère. Tandis que mon corps est sacré. L’éternité est devant moi. C’est le message à faire passer.
    - Qui est l’agresseur ?
    images.jpeg- Un fou. Du nom de Massimo Tartaglia. Aussitôt arrêté par la police. Un type que j’ai payé. Grassement. Je suis allée le voir dans son asile. Près de Varèse. Il plantait des
    épingles dans des cactus en pot. Il tirait la langue. Absorbé par sa tâche. Il voulait devenir Pape. Je ne suis pas certaine qu’il ait compris le sens de sa mission. Mais il l’a exécutée tip top.
    - Une fois de plus, Papi a donc triomphé de la mort ?
    - En apparence. Ce coup sur la tête l’a sonné plus qu’il ne veut l’admettre. Comme si cette tour de Pise en miniature lui avait fait perdre l’équilibre. Peut-être, d’ailleurs,
    que le choc a détruit une partie de ses neurones. Commotion cérébrale. Petite hémorragie interne. Quoi qu’il en soit, il n’est plus comme avant. La politique ne l’intéresse plus. Du tout.
    - Ce n’est pas nouveau.
    - Non. Mais cette fois il s’en fout carrément. Il délègue ses pouvoirs aux ministres, qu’il méprise. Il ne lit plus les nouveaux projets de loi. Les journaux. Les magazines people. Il n’écoute plus ses conseillers personnels. Il passe toutes ses journées devant la télévision. À visionner des DVD. Et même des VHS. Ça lui rappelle les premiers temps de sa gloire. La terreur est greffée sur son visage.