Dans la galerie des Grandes Têtes Molles de notre époque, Monsieur Pierre Weiss occupe une place de choix : la première peut-être. Ce notable libéral, genevois jusqu'au bout des ongles, c'est-à-dire fort en gueule, velléitaire, aveugle à toute vision à long terme, a une bête noire contre laquelle il part régulièrement en croisade : les enseignants, qui provoquent chez lui de véritables cauchemars (il est piquant de noter que l'épouse de Monsieur Weiss est elle-même enseignante, ceci expliquant sans doute cela).
En d'autres temps, et sous d'autres latitudes, Monsieur Weiss aurait été ministre de la Propagande — et un des meilleurs. En effet, il excelle dans l'art de falsifier les chiffres et de manipuler la vérité. Dans un papier récent (voir ici), Monsieur Weiss s'en prend, une fois de plus, aux enseignants — ou plutôt à leur syndicat — auxquels il reproche des revendications abusives. Pour argumenter son propos, Monsieur Weiss cite plusieurs chiffres, tous faux.
Par exemple, l’augmentation du nombre des élèves. Pour M. Weiss, elle se monterait à 620 élèves. Dans la réalité, cette augmentation se monte, pour le Post Obligatoire, à 1150 élèves. La différence est minime, me direz-vous : on passe du simple au double ! Mais M. Weiss — pur produit de l'école genevoise — est fâché avec l'arithmétique. Autre chiffre fantaisiste : la ratio maître/élèves. Pour M. Weiss, elle est de 12,45 élèves par poste. Dans la réalité, les cours (de langues en particulier) se donnent dans des classes de 24, voire 25 élèves (alors qu'il n'y a que 24 chaises et pupitres par salle de classe!). Là encore, M. Weiss se livre à une manipulation assez infâme, et bien dans l'esprit populiste qui est le sien. Mais il est plus facile d'affirmer n'importe quoi que de se renseigner.
Champion du monde de la mauvaise foi, M. Weiss est pourtant jaloux de son petit pouvoir (il siège à la Commission des Finances). C'est pourquoi son papier s'achève sur des menaces : les postes supplémentaires que réclament les syndicats pour accueillir les 1150 nouveaux élèves au PO sont irréalistes. Ils risquent donc d'être refusés. Les enseignants n'ont qu'à se débrouiller, une fois de plus, avec les moyens du bord. Ils en ont l'habitude. M. Weiss veut une école efficace et de bonne qualité, avec beaucoup d'élèves et peu de profs. C'est la vision libérale de l'école genevoise qui, face à l'augmentation de près de 30% des effectifs depuis 1991, a généreusement accordé 3% de postes d'enseignants supplémentaires…
Quand on vous disait que M. Weiss était fâché avec les chiffres…