Dans notre société libérale et numérique, il y a des sujets tabou : le conflit israélo-palestinien, par exemple, ou, ces jours-ci, la question du « deal de rue ». Très vite, le débat est politique, c'est-à-dire saturé de lieux communs et donc sans issue. Il aura suffi qu'un citoyen et père de famille lausannois, Fernand Melgar (par ailleurs, cinéaste défenseur des migrants) pousse un cri de détresse contre les dealers qui écument les rues proches des écoles pour que toute la Suisse romande bien-pensante lui tombe dessus…
Les reproches adressés à ceux qui dénoncent les dealers sont toujours les mêmes : stigmatisation, racisme, relents de xénophobie, etc. Je n'y reviendrai pas, tant ils me paraissent ridicules et de mauvaise foi : ce sont les symptômes du déni.
Une chose, seulement, me frappe: cette manière sournoise, sous prétexte de défendre ces pauvres-dealers-qui-n'ont-pas-le-choix, de banaliser la drogue et ses ravages. Tout se passe comme si on l'oubliait toutes les vraies victimes des marchands de la mort (je connais aussi des familles décimées par la mort d'un adolescent ou sa lente descente aux enfers).
Cela ne compte pas, me direz-vous. Ou si peu. Le réel n'a rien à faire dans les débats idéologiques…
Le Mal existe, quoi qu'en disent les bien-pensants. Il prend aujourd'hui toutes sortes de formes différentes. Il peut aussi concerner le monde de la drogue et des dealers. Il ne s'agit pas, ici, de stigmatiser qui que ce soit, mais de reconnaître simplement l'existence du Mal. Et non de le banaliser. Hannah Arendt a écrit des choses capitales sur cette question. Il est utile d'y revenir.
Impossible de débattre sereinement de ces questions: ils sont aujourd'hui gangrénées par l'idéologie. Mais une question demeure : faut-il banaliser le Mal ?