Certains jurys littéraires ont le nez fin. Ils savent découvrir, dans la marée saisonnière de la rentrée, la pépite qui brillera de mille feux. C'est le cas du jury du Prix Renaudot (et Renaudot des lycéens) qui ont placé le dernier roman de Michel Quint, La Printanière*, dans leurs listes.
On ne présente plus Michel Quint, auteur d'une vingtaine de romans (dont Effroyables jardins, le plus connu, paru en 2000, fut adapté au cinéma par Jean Becker, avec Thierry Lhermite, Jacques Villeret, André Dussolier et Benoît Magimel). Dans La Printanière, il s'appuie sur son expérience d'ancien prof de lycée pour construire une intrigue à la fois passionnante et déroutante, réglée comme une mécanique de précision.
Étienne Vancauwenberghe (appelons-le Vancau) tient le registre, au jour le jour, d'événements qui ont bouleversé sa vie. Nous sommes à Lille, en 2018, et la ville est en proie aux manifestations des Gilets jaunes. Ecoutez la première phrase du roman : « Je suis entré dans cette apocalypse en jaune et noir avec un sourire imbécile et des joues bouffées de larmes ». Comme on sait, ces manifestations, qui n'étaient pas violentes à l'origine, ont vite été investies par les black blocs. C'est ainsi que Vancau, rentrant chez lui, se trouve tout à coup encerclé par un groupe de casseurs. Il voit déjà sa fin proche. Apparaît alors une fille en survêtement, familière avec l'art de la boxe, qui intervient et lui sauve la vie. Une fille au parfum de printemps : la Printanière. Il l'appelle, il aimerait la retenir, mais elle a déjà disparu dans la foule et les gaz lacrymogènes.
Tel est le point de départ d'un récit haletant, qui prend la forme d'une quête à proprement parler existentielle et qui mènera Vancau dans de nombreuses salles de sport, le transformera en détective et lui fera rencontrer plusieurs personnages attachants et singuliers. Chacun d'eux, comme il se doit, porte en lui un secret, souvent inavouable. Vaucau mène l'enquête qui se révèlera un véritable chemin de croix avant de toucher la vérité — une vérité bien sûr inattendue et bouleversante.
Michel Quint mène son récit d'une main de maître. L'intrigue, mais aussi le style d'une écriture à la fois savoureuse et précise. Du grand art. Ses personnages ne nous quittent plus : Leila, Simone, Claudia, Christine, Jeff. Vancau va devoir dénouer beaucoup de nœuds avant d'atteindre une vérité qui lui file constamment entre les doigts.
* Michel Quint, La Printanière, Serge Safran éditeur, 2022.